CARTE D’IDENTITÉ → Emmy n'est pas le genre de personne sur laquelle les autres se retournent dans la rue. Pas de tatouage, de piercings ou de vêtement provocateur pour elle, Emmy se fond très facilement dans la masse. Loin de vouloir attirer les regards, elle cultive un style sans prétention, que ce soit à travers son maquillage qu'elle tient à garder discret et naturel, ou par ses vêtements. Ses derniers ne sont peut-être pas de marque, chose qu'elle ne peut de toute manière pas se permettre, mais ils possèdent leur propre charme malgré leur côté simpliste. Si Emmy a tendance à privilégier les shorts, robes et autres vêtement à motif fleuri, elle ne rechignera cependant pas à passer son week end en pyjama ou en jogging chez elle. Pour ce qui de ses chaussures, ce sont la plupart du temps des ballerines ou des bottines qui habillent ses pieds, à talons ou non. Sans en être pour autant superficielle, Emmy aime prendre un minimum soin de son apparence lorsqu'elle sort, c'est après tout ce que les gens vont juger en premier quoi qu'on puisse croire. Ses longs cheveux bruns, elle préfère les laisser libre plutôt que d'en faire une coiffure sophistiquée, même s'il n'est pas rare de la voir de temps en temps coiffé d'un chignon décontracté ou d'une tresse. De ses traits et de ses yeux pales se dégage bien souvent de la gentillesse et de la bonne humeur lorsqu'elle sourit. Des manies, la jeune fille en possède quelques-unes. Emmy a notamment pris la vilaine habitude de se ronger les ongles ou de mâchouiller le bouchon de ses stylos lorsqu'elle est en période d'examen ou nerveuse, c'est plus fort qu'elle. Ses veillés et son travail laisse aussi régulièrement des cernes sous ses yeux bleus et font d'elle une grande consommatrice de café et de jus de fruits. Vous ne serez pas le premier à la voir piquer du nez sur ses cahiers à la bibliothèque.
   

PERSONNALITÉ → Nombreux sont ceux à décrire Emmy comme une travailleuse. Nul besoin de connaitre la jeune fille depuis des années pour en attester, lorsque celle-ci n'a pas le nez penché sur ses études, c'est généralement pour enchainer plusieurs petits boulots afin d'apporter quelques maigres sommes à son compte en banque. Certains diront qu'elle en fait trop, sa famille en premier. Au fond, ils n'ont surement pas tord, car il est vrai qu'Emmy a la manie de s'infliger beaucoup plus de pression qu'elle n'est capable d'en gérer, surestimant souvent sa résistance au stress. Par nécessité, car elle est bien consciente que l'on n'a rien sans rien, par réel besoin de se sentir utile ou par peur de décevoir, ça, même elle finit par s'y perdre. Elle est loin d'être le genre de personne à se laisser gentiment porter par le destin ou la vie, appelez ça comme vous voulez. Sa vie, Emmy se plait à croire qu'elle est en train de la construire, que tous ses efforts présents payeront dans un futur proche. Elle entretient un idéal qu'elle envie à la population dorée de Londres depuis son enfance. De l'ambition, des rêves, elle en a, peut-être un peu trop parfois, car même si elle est capable de beaucoup d'optimisme, elle ne se fait néanmoins pas d'illusion. Certains rêves ne se réalisent pas, et ce n'est certainement pas grâce à un prince charmant qu'elle pourra payer son loyer à la fin du mois.

Et encore, même si ce dit prince débarquait du jour au lendemain sur son fidèle destrier, rien ne peux affirmer qu'Emmy accepterait son aide pour autant. Indépendante et débrouillarde, Emmy peut en effet se montrer assez réticence face aux aides extérieurs, jusqu'à en devenir assez têtue et buté. C'est même surement son plus grand défaut. L'idée d'avoir une dette envers quelqu'un, ou pire de passer pour un fardeau auprès de ses proches la pousse ainsi a souvent accumulé les charges de travail et à faire les choses par elle-même quoi qu'il en soit. De nature altruiste, si Emmy n'aime pas recevoir elle tient paradoxalement le discours contraire lorsqu'il s'agit de donner et souhaite dévouer sa vie à aider les autres en devenant assistante sociale.

Outre son côté travailleuse, Emmy n'est cependant pas le cliché de l'élève sérieuse qui privilégie son travail en vivant solitaire. Dès le premier abord, elle apparait tout de suite comme quelqu'un de sociable. Très souriante, aime rire et s'amuser, s'exprime facilement et ne laisse en rien paraitre le stress et les émotions qui la rongent de l'intérieur. La jeune femme fait partie de ces gens persuadés que, dans les moments difficiles, chaque lendemain est capable d'apporter quelque chose de meilleur que le dernier. Ce genre de pensée optimiste peuvent paraitre naïve pour certains, mais elles lui permettent de continuer d'avancer en faisant preuve d'une grande détermination.

Certainement pas aussi forte qu'elle se prête à le penser, Emmy possède ses parts de fragilités. Car derrière son sourire, Emmy n'en reste pas moins une personne sensible à ses émotions, qui même refoulés finissent très souvent par exploser à un moment ou un autre mêlé à la fatigue et au stress, que ce soit sous forme de tristesse ou de colère. Il est rare de la voir se confier à autrui, ses problèmes, Emmy préfère les encaisser et les garder pour elle, de peur de décevoir ses proches. Des hauts et des bas, il y en a, mais elle finit toujours par se relever, ça c'est certain.
   

2001. La tête posée contre la vitre du bus, Emmy s'amusait à secouer ses jambes qui ne touchaient même pas à terre tout en adressant un petit sourire en coin à son frère, Joshua, debout dans l'allée. Il était rapidement agacé par la vivacité constante d'Emmy, et elle du haut de ses 6 ans, le savait très bien. Après un énième regard menaçant de la part de son frère, la petite se décida à se calmer et concentra toute son attention à l’extérieur. Bientôt, les immeubles, les successions de petites maisons en brique identique et les bâtiments mal entretenues qui défilaient depuis plusieurs minutes disparurent au profit d'allée commerçante et de jolies habitations. Juché sur son siège, Emmy aimait bien observer les vitrines s'allumer et les gens bien habillé partir travailler, c'était comme si toute la ville se réveillait sous ses yeux. Elle avait encore du mal à comprendre pourquoi elle et son frère se donnaient la peine de faire autant de trajet pour aller à l'école le matin, alors que tous les enfants de son immeuble pouvaient profiter d'une heure de sommeil supplémentaire en se rendant à l'école non loin du quartier. Joshua disait que c'était pour ne pas finir comme Madame Watkins. La fameuse Madame Watkins, c'était la voisine du dessous. Emmy ne l'aimait pas trop, elle criait beaucoup, laissait ses poubelles sur le palier et souvent le propriétaire lui rendait visite et ameutait tout l'immeuble pour lui réclamer des sous. Même si elle ne voyait pas vraiment le rapport, c'était une excuse suffisante pour accepter de prendre le bus tôt le matin.

Le bus s'arrêta. Une petite tape sur l'épaule venant de Joshua lui fit comprendre qu'il était temps de descendre. À peine les pieds sur le trottoir, il se pressa de débarrasser sa petite sœur de son sac malgré les cris de protestation de cette dernière.

« Je peux porter mon sac tout de seule ! »
« Non, ça te ralentis, allez dépêche ! »

Emmy fit la moue. Elle avait beau adorer son grand frère, de 5 ans son ainé, parfois il était beaucoup trop autoritaire et collant. Ça ne l'empêcha pas de courir pour le rattraper. Une fois devant l'école, il lui remit son sac sur les épaules avant de la pousser gentiment vers l'entrée.

« Travail bien surtout. »


« Serena Montaigu ? »

2010. Pas de réponse. Monsieur Peterson releva la tête, mais la place vide témoignait d'elle-même que la jeune Montaigu avait visiblement meilleur à faire que de daigner venir en cours de physique. Tant pis pour elle. À 15 ans, Emmy ne se souciait plus vraiment des faits et gestes de celle qu'elle avait côtoyé plus jeune. Serena s'était métamorphosé ses derniers mois et le moins qu'on puisse dire c'est qu'Emmy était loin de comprendre ce qu'il pouvait passer par la tête de la blonde. Plus jeune, elle l'avait envié. Beaucoup. C'était toujours le cas d'ailleurs. La vie de Serena, c'était tout ce dont Emmy avait pu rêver : un nom connu et une famille aisée à l'abri de tout besoin. Elle aussi aurait aimé pouvoir venir au lycée avec le dernier Smartphone en vogue, rentrer chez elle autrement que dans un bus bondé et faire ce qu'il lui plaisait et ce même durant les heures de cours. Mais ça, ce n'était même pas envisageable. Parce que, voyez-vous, l'établissement ne pouvait bien sûr pas se permettre de laisser sa chance à n'importe qui. Un comportement semblable à celui de Serena lui aurait valu un revoit direct, elle n'était ni une Montaigu, ni une Capulet, ni personne. Juste une fille qui avait dû faire beaucoup d'effort pour prouver sa valeur et entrer ici, et non dans son lycée de secteur. Emmy n’aurait de toute manière jamais pu infliger une telle déception à ses parents. Serena ne devait pas se rendre compte de sa chance.

Emmy n'était pas malheureuse pour autant, même avec un grand frère de plus en plus absent dû à ses études et une petite soeur sous les bras. Elle aussi pouvait s'estimer chanceuse, elle savait qu'il y avait beaucoup plus malheureux qu'elle dans le monde. Pourtant, elle ne pouvait s'empêcher de désirer plus. Son futur, elle le voyait dans un joli quartier londonien, loin des banlieues périphériques. Ces années de scolarité auprès de plus riche qu'elle et lui avait forgé cette ambition et cette envie qu'elle partageait depuis toujours avec Joshua. Les yeux rivés vers ce que le professeur écrivait au tableau, elle sourit. Elle y croyait, ce serait pour bientôt.


2012. Son frère voulait lui parler. C'était important qu'il disait. Ça, Emmy voulait bien y croire. Joshua s'était plutôt fait discret ces derniers jours et les rares fois où il avait décidé de passer à l'improviste à l'appartement familial, c'était pour annoncer son mariage précipité avec sa dernière petite amie, Lauren, ou encore la grossesse accidentelle de cette dernière. Autant dire que ces deux nouvelles avaient eu l'effet d'une bombe sur toute la famille et que la relation entre le frère et la sœur s'en était retrouvé légèrement tendu. Emmy soupira en apercevant Joshua qui, accoudé à un mur, l'attendait devant l'entrée du lycée. L'expression grave qu'affichait son visage ne présageait rien de bon. Elle n'avait pas envie d'avoir une énième discussion sur le sujet avec lui, ils avaient déjà fait le tour de la question et son frère savait parfaitement ce qu'elle pensait de cette histoire. Décidé à ne pas s'éterniser, elle vint se planter devant lui sans dire un mot, attendant de voir ce qu'il avait de si urgent à lui faire part. Après de longues secondes, Joshua finit par baisser le regard en se contentant de lâcher un :

« J’ai tout plaqué, Emmy. J’arrête les études. »

Voilà, il l'avait dit. Ce serait mentir que de dire qu'elle ne s'y attendait pas. Pourtant, elle ne s'était pas préparée à ressentir autant de déception face à cette annonce.

« Et qu’est-ce que tu comptes faire ? » Articula difficilement Emmy, faute de trouver autre chose à dire.
« Trouver un job et un appart' pour m’occuper de Lauren. »

Oui, bien sûre, c'était la suite logique des choses. Un événement imprévu, de nouvelles responsabilités, un besoin pressant d'argent... Emmy secoua la tête. Elle n'arrivait pas à croire qu'il en était arrivé là. Son frère, celui qui lui avait tant répété que l'école serait la clé pour une vie meilleure, celui avec qui elle avait tant de fois parlé d'un avenir commun dans une jolie banlieue résidentielle de Londres ou à l'étranger, venait de briser toutes les belles promesses qu'il lui avait faites en l'espace de quelque seconde. Au lieu de ça, voilà qu'il allait à son tour répéter les erreurs de leurs parents en allant s'enclaver dans un quartier pourri, lui qui avait pendant si longtemps affirmé qu'il serait le premier Lancaster à en sortir. Pire que déçue, elle se sentait trahie, avec l'horrible impression d'assister impuissante à la chute de son frère.

« …Mais,  et tes projets, je croyais que tu voulais toujours partir pour les États Unis, je croyais qu-» commença t’elle.
« Les choses ont changé Emmy, j’ai sérieusement merdé. »
« Tu as merdé ? »  Elle leva les yeux au ciel, un sourire désabusé sur les lèvres. « T’as tout gâché oui. »

Ce n'était pas croyable. Pas après tout ce que leurs parents avaient fait pour qu'ils réussissent. Ils leur avaient donné toutes les cartes pour réussir et ce depuis le début ! Alors que de son côté elle travaillait dur pour ne décevoir personne, lui se permettait des actes complètement irréfléchi. Malgré les circonstances, elle était en colère contre lui et l'irresponsabilité dont il avait fait preuve.

« Compte pas sur moi pour le dire à Papa et Maman. »
« Ils sont déjà au courant. Mais j'm'en fais pas trop pour eux, ça fait un moment que leurs espoirs reposent plus sur moi de toute façon. »


2015. Discrètement accoudé au comptoir, Emmy attendait avec impatience la fin de son service. Les premiers signes de fatigue se faisaient déjà sentir, et elle avait hâte de pouvoir rentrer chez elle pour profiter d'une bonne nuit de sommeil. Depuis qu'elle avait décroché son baccalauréat, sa vie avait pris un autre tournant. Ses professeurs lui avaient longtemps vendu toute sorte d'école renommée dans lequel une élève rigoureuse comme elle pourrait trouver sa place, lui assurant qu'avec son profil elle pourrait facilement obtenir une bourse ou une place en internat. Mais ce n'était pas ce qu'elle désirait. Elle ne voulait plus se retrouver encadrée entre les murs d'une école avec des professeurs constamment derrière son dos, elle avait soif d'indépendance et de liberté, ce qui l'a poussa à privilégier l'université. Elle avait quitté le nid pour s'installer en collocation dans un appartement non loin du centre de Londres et ses horaires de cours lui avaient rapidement permis de trouver un petit boulot. Depuis, elle enchaînait les contrats déterminés pour financer son logement, ses études, mais aussi toutes les petites dépenses de la vie quotidienne et celle à venir. Ce n'était pas tous les jours faciles, mais Emmy s'y était fait, et l'idée que ses parents allaient peut-être enfin pouvoir quitter leur petit appartement Londonien pour une maison en campagne et offrir une vie plus calme à Mia, sa petite sœur, ne lui faisait en rien regretter ses décisions. Oui, malgré tout, elle était heureuse. Son entrée à l'université lui avait valu de nouvelle rencontre comme Chace, avec qui elle était vite devenue ami grâce à des cours de psychologie commun, ou les deux phénomènes avec qui elle vivait. Quand à Serena, Emmy n’en entendait parler qu’à travers les propos de Chace ou part les médias, en particulier en cette période.

Elle n'en savait que très peu sur ce qui avait poussé les deux familles à se faire la guerre, cependant elle ne pouvait pas rester indifférente aux conséquences que cette querelle avait eu. C'était déchirant de voir comment des conflits familiaux avait pu détruire deux jeunes êtres. Emmy ne croyait aux théories de meurtres qui circulaient dans les journaux peoples, elle était persuadée que le désespoir de ne pas pouvoir être ensemble avait pu pousser Roméo et Juliette a commettre l'irréparable. C'était peut-être romantique, mais surtout terriblement triste.

Lorsqu'elle quitta le cinéma dans lequel elle travaillait pour rentrer chez elle ce soir là, elle eut la surprise de tomber sur son frère, qui une fois encore semblait l'attendre à la sortie.

« Joshua ? Qu'est-ce que tu fais là, quelque chose ne va pas ? »
« Non, ça va, ça va. »

Il mentait, ça n'allait visiblement pas bien. C'était comme ça depuis des mois, quelque chose se tramait chez son frère sans qu'elle puisse savoir quoi. Il refusait de lui dire quoi que ce soit, quand à Lauren, elle devait en savoir encore moins qu'elle. Emmy n'était même pas sûre que son frère ait confié à sa femme qu'il n'avait plus d'emploie depuis plusieurs mois et qu'il en était réduit à demander de l'aide à sa soeur pour joindre les deux bouts à la fin du mois.

« Combien il te faut ? »
« 100 livres devraient suffire. »

Emmy sortit un chéquier de son sac non sans laisser un soupir s'échapper. C'était ses économies pour son permis qui s'envolait. Joshua avait peut-être accumulé les erreurs et qui savait ce qu'il faisait de ses journées pendant que tous le croyait au travail, mais il restait son frère, elle était incapable de refuser. Ça, il en était conscient.

« Tu me sauves la vie, merci p'tite soeur. » lui dit il en la serrant dans ses bras.
« Il faudrait que tu fasses quelque chose, je veux bien t'aider mais je pourrai pas le faire éternellement. J'ai besoin de cet argent moi aussi. »
« Ne t'en fais pas, j'te rembourse dès que je peux. »

Elle secoua la tête, ces remboursements, elle ne les attendait pas. Si c'était le cas, elle aurait déjà réclamé depuis un moment les quelques 400 livres qu'il lui devait. Tout ce qu'elle voulait, c'était que ces demandes d'argent soient moins régulières et qu'il trouve un travail, faute de lui confier ce qu'il lui arrivait. Enfin, elle n'était pas non plus du genre à étaler ses problèmes aux autres, alors elle pouvait bien comprendre. Cependant, elle n'était pas sûre que ce soit une bonne chose non plus. Seul l'avenir le lui dira.